Dans un sondage Ifop pour 82% des personnes interrogées répondent oui à l’affirmation que l’entreprise est responsable du bonheur de ses salariés. Voilà de quoi alimenter quelque peu les débats. Surprenant ? En fait pas tant que ça…
Bonheur, sens du travail et raison d’être : le regard des salariés français sur l’entreprise
Au travers de ces 82%, réjouissons-nous tout d’abord que le travail et l’entreprise soient vus comme une contribution à l’épanouissement personnel et non plus comme une aliénation dont il faut réduire inlassablement la part. Dans le même temps, les mêmes sondés ne se bercent pas d’illusion sur le but de leurs employeurs : servir ses clients et faire de profits. Et cela ne parait pas inconciliable, bien au contraire !
Ainsi, 58% des personnes interrogées se sentent liées à leur entreprise au-delà du contrat de travail : quel que soit le sens pris par cette affirmation, elle démontre la force du lien qui régit la relation entre l’entreprise et ses salariés.
Etant donné la part que représente l’activité professionnelle dans la vie d’un actif, il parait évident que la plupart des gens préfèrent être bien au travail. Les mots « responsable » et « bonheur » peuvent cependant être soumis à interprétation… Heureusement, les autres questions de l’enquête (qui concerne en fait à la fois le bonheur, le sens du travail et la raison d’être) apportent un certain nombre de pistes qui doivent interroger au moment de fixer les priorités en termes d’axe de travail dans une stratégie RH globale d’entreprise.
La satisfaction du travail bien fait, la reconnaissance de la valeur de son travail, la convivialité et la qualité des relations avec ses collègues et le plaisir d’apprendre pèsent ainsi près de la moitié des motivations citées spontanément. Sur ces quatre critères, l’entreprise a clairement une responsabilité directe par le biais de sa culture, de son organisation et de ses relais managériaux. Correctement réguler les facteurs culturels, organisationnels et sociaux est donc plus qu’essentiel Aujourd’hui encore plus que hier compte tenu de l’ampleur des changements et de leur rapidité. Cela favorise et canalise aussi l’implication, qui est une attente très forte des salariés (voir les réponses à la question « en matière de réflexion dans votre entreprise, laquelle de ces affirmations correspond le mieux à ce que vous pensez ? »). Mettre en place une salle de sport, un baby-foot et d’autres services davantage liés à la sphère privée peuvent bien entendu apporter un plus à condition de faire partie d’une stratégie plus vaste car, dans les faits, ces solutions ne s’adressent qu’à une minorité de salariés et ne peuvent prétendre à être la réponse à l’aspiration légitime de tous d’être bien dans son environnement de travail – ce qui ne veut pas dire ne jamais connaître de moments difficiles.
Dans l’enquête, la rémunération arrive bien sûr en première position des critères de motivation. Paradoxalement, sachant que cela risque d’être une quête sans fin, ce n’est pas forcément dans ce domaine que l’entreprise a le plus de marge de manœuvre. Il faudra reconnaître un jour que le problème n’est pas tant ce qui est déboursé par l’employeur pour ses salariés, que ce qui leur reste in fine à disposition une fois enlevées toutes les cotisations, taxes et charges obligatoires (logement, électricité, essence, etc.) elles-mêmes lourdement taxées. Mais au-delà du niveau même de la rémunération, le sentiment d’équité joue un rôle prépondérant dans le sentiment d’être correctement payé pour le travail effectué. Là aussi, l’entreprise et son encadrement ont une responsabilité primordiale dans ce qui contribue à l’épanouissement des salariés et donc au fait de se sentir bien.
Alors, oui l’entreprise est bien responsable dans un certain sens du bonheur de ses salariés, non pas dans une quête infinie du plaisir, mais d’un pan de l’épanouissement personnel. Attention cependant de ne pas transférer aux entreprises une responsabilité dans le bonheur de leurs salariés qui ne relève pourtant pas du champ professionnel : l’entreprise ne remplace pas la famille, les amis et les passions plus personnelles dont chacun a besoin pour son équilibre.